!Mediengruppe Bitnik & Low Jack
Alexiety
Pour l’installation vidéo et sonore interactive Alexiety (2018), trois morceaux ont vu le jour dans le cadre de la collaboration avec le compositeur de musique électronique Low Jack (Philippe Hallais) basé à Paris. Il s’agit de la matrice émotionnelle de l’évolution potentielle de notre relation aux assistants personnels intelligents, tels qu’Alexa, Siri et Google Home. En parallèle de l’installation, les morceaux ont été diffusés en édition limitée sur un support de données, qui a rejoint la collection de la HeK.
Le premier morceau, No Secrets No Surprises, raconte l’euphorie insouciante liée à la satisfaction immédiate de nos besoins et à l’attention permanente. Avec Alexa Stop, l’utilisateur commence à se dissocier de son amie et assistante, en étant forcé de fixer sans cesse des limites car toute sa vie se trouve sur écoute et analysée. Dans la troisième phase du dernier morceau, Alexiety, l‘enthousiasme initial est totalement supplanté par de l’inconfort, voire de l’angoisse, face à l’analyse omniprésente des accompagnatrices invisibles, qui, avec le temps, savent non seulement répondre immédiatement à nos envies matérielles, mais ont de surcroît enregistré dans leur cloud la clé de nos désirs les plus intimes.
Les morceaux sont joués par des haut-parleurs, tandis qu’Alexa et ses semblables tentent d’y réagir de façon habituelle. Alors que les émotions gagnent en intensité de façon clairement identifiable pour le public, les assistants intelligents parviennent de moins en moins à appliquer correctement leurs algorithmes et finissent par faire chou blanc. Ils ne sont pas encore capables de traiter les émotions. Actuellement, la recherche mondiale s’efforce d’intégrer l’intelligence émotionnelle aux systèmes informatiques. Tandis que le public humain perçoit instinctivement le basculement émotionnel de la relation à Alexa & co. et se trouve en mesure de le comprendre, les assistants intelligents demeurent impuissants face à la surcharge émotionnelle. Le fossé qui apparaît aujourd’hui entre l’omniscience indispensable de ces assistants et leur incapacité directe à réagir de façon pertinente à tout ce qui s’éloigne, ne serait-ce que légèrement, des normes identifiables par les algorithmes, met en lumière les limites des systèmes algorithmiques. Avec Alexiety, nous regagnons le contrôle grâce à une désinformation chaotique. Mais qu’en est-il chez nous ?
(Texte : Bettina Back)